Présentation du contexte géologique des Tours Saint-Jacques
Selon notes prises à l’occasion de la sortie du 28/09/2014
La sortie figure dans la brochure des sorties Espaces Naturels Sensibles du Conseil Général.
Elle était organisée le 28/09/2014 dans le cadre de la Fête de la Science par le Musée de Gruffy (dont le Président Albert Dutarte présent a fait l’introduction), était encadrée par Rando Découvertes (dont le Président Marc Onillon) et animée par les experts en géologie et géomorphologie (Robert Viant et René Poty), et minéralogie fossile (Luc Bouillon).
Géomorphologie
La géomorphologie du site de la cluse de Bange, ouverte par le Chéran entre le Semnoz et la Montagne de Bange, est expliquée depuis le point de départ devant le cimetière d’Allèves.
Les Bauges calcaires font partie des Préalpes, ou relief subalpin. Les couches sédimentaires se sont accumulées au fond de la mer à l’ère secondaire (-250 à -65 millions d’années), avant d’être élevées et plissées par la surrection des Alpes au tertiaire (à partir de -50 millions d’années). Elles présentent côté Semnoz une alternance de strates calcaires (falaises) et de marnes (pentes plus douces boisées). Vues du cimetière, la falaise supérieure du Semnoz est du calcaire Urgonien, celle du dessous, plus épaisse, est du calcaire Valenginien (ou Fontanil sur les sites internet ci-après).
A noter que le calcaire du Semnoz s’arrête à la falaise au-dessus d’Allèves : plus haut et au sommet, le Semnoz n’est pas constitué de calcaire dur comme on le croit, mais de matériaux tendres, marnes et argiles (comme le long du chemin du Chenet de la balade). Schémas du Semnoz sur les sites :
http://www.geol-alp.com/bauges/_lieux/tours_st_jacques.html, ou
http://www.geol-alp.com/bauges/_lieux/semnoz.html
Le même empilement de strates se retrouve du côté de la Montagne de Bange, qui est le prolongement du même anticlinal, tranché transversalement par le Chéran.
Le Chéran a creusé le calcaire en cet endroit car il y avait un point faible, de plus en bas du pendage du Semnoz. Les bords de la rivière ont été écartés par l’érosion, puis soulevés par la poussée des Alpes. Le Chéran coulait avant la poussée des Alpes, mais on ne sait pas s’il y avait déjà une faille, qui serait aujourd’hui enfouie.
Au niveau du Pont de l’Abîme, les couches d’urgonien et de valenginien se sont retournées en butant sur le front des Bauges au tertiaire, et séparées du reste du pli. L’urgonien plus récent et plus dur se retrouve paradoxalement au-dessous du valenginien plus ancien. C’est « l’effet tartine », une des caractéristique du Géopark. Les appuis du pont reposent sur la barre dure d’urgonien.
Rappels, le calcaire se forme par la précipitation et la sédimentation au fond des mers de micro-organismes (coquillages et squelettes des micro-algues et animaux marins) et leur consolidation par la diagenèse (processus physico-chimiques et biochimiques par lesquels les sédiments sont transformés en roches sédimentaires). Les calcaires ont piégé le carbone, à une époque où il était beaucoup plus abondant. Et à des époques où le climat était plus chaud qu’aujourd’hui. Le problème actuel n’est pas le réchauffement climatique en lui-même, mais sa vitesse accélérée par l’homme.
Les calcaires, eux-mêmes résidus de fossiles, contiennent souvent des fossiles, caractéristiques de chaque calcaire.
Les Tours Saint-Jacques
Les Tours sont constituées de 3 monolithes calcaires du Valenginien qui se sont détachés du Semnoz (la niche d’arrachement reste bien visible) et glissent vers le Chéran au niveau du hameau d’Aiguebelette. Site internet : « Il s'agit d'un typique ensemble de paquets tassés (selon le site internet M. Gidon, ou préférablement glissés selon Robert Viant), isolé comme un gâteau au coeur d'un véritable cirque à plancher incliné vers le Chéran (vers le sud) et centré sur le village d'Allèves. Ce cirque est cerné par une barrière de falaises de calcaires du Fontanil (Valenginien)».
Les blocs se sont détachés mais ont d’abord été maintenus contre la paroi par le glacier ; puis à la fonte des glaciers (-11000 ans) la décompression les a libérés ; le bloc des Tours qui ne s’est pas disloqué et éboulé a commencé à glisser puis s’est entrebâillé en 3 tours : la plus grosse dénommée Tour Saint-Jacques, la 2ème Tour Philippe, la 3ème la plus petite et torsadée, la Tour Fine.
Le glissement est permis par la couche tendre d’argiles et marnes sous le calcaire, qui devient une planche savonnée avec l’eau qui s’infiltre dans le calcaire-passoire. Le glissement est d’autant plus facile que le Semnoz est en pente vers le sud, et que le creusement du Chéran a sapé la dalle calcaire.
Les 3 tours sont réputées indépendantes donc glissent à des vitesses différentes selon les obstacles, celle du milieu plus vite. Mais globalement elles glissent ensemble, sinon il y aurait collisions et éboulements, à une vitesse moyenne de l’ordre de 2cm/an.
Description de la balade
Départ sous l’église : le PD Allèves 640m indique les Tours à droite par le chemin du Perchet en 1h, à gauche par le chemin du Chenet en 1h. Le circuit peut se faire dans les 2 sens. La présente balade démarre en remontant à droite de l’église par la rue Sur la Vy.
Après une fontaine, au n°1 la maison ocre à volets verts est celle d’Yvonne Dubois, romancière, auteure de La vallée des cyclamens - cahiers d’une paysanne savoyarde, ouvrage couronné de plusieurs prix. La vallée du Chéran est surnommée la vallée des cyclamens : avant la guerre, la cueillette des cyclamens, commercialisés sur Aix-les-Bains et Paris, procurait à ses habitants un complément de revenu ; remis au train à la gare d’Annecy, ils étaient portés à l’Opéra le soir même.
Tourner à gauche vers le chemin des Charbonnières, remonter jusqu’à l’intersection PD Chemin du Perchet Figlia 3h à droite, Tours Saint-Jacques par le chemin du Perchet 50’ à gauche.
Le sentier est dit « voie romaine », à tort car les dalles "auraient été posées par des ouvriers italiens au 19e siècle, pour descendre en hiver au village sur des luges le foin stocké dans les granges" (selon internet) et en été à dos d’homme.
Sur la gauche, un parc abritant des cervidés appartient à l’ancien maire d’Allèves, Henri Navet.
Dans la montée, la végétation change : de hêtres sur dépôts glaciaires en bas, elle accueille pins et genévriers, car le sol devient marneux : on est sur la couche argileuse glissante.
Après 30’, une plateforme sur la gauche est surnommée « le Petit Nice », car elle est ensoleillée, la végétation est méditerranéenne. En face s’étale le synclinal urgonien du Mariet (non retourné en tartine !). L’anticlinal valenginien s’élève sur la droite, tourne au-dessus de Cusy, et on devine qu’il rejoint son prolongement du Semnoz. La falaise visible au-dessus de Cusy est dans l’urgonien. L’urgonien est retourné sous le valenginien au niveau du Pont de l’Abîme.
Au niveau des Tours (PD 900m), les pieds courbés de quelques arbres traduisent le glissement. Remonter au pied des tours et descendre le pierrier jusqu’au pt de vue sur le Pont de l’Abîme (20’).
Retour par les charbonnières : du PD des Tours, continuer le sentier de l’autre côté vers le parking. En bas d’une légère descente de 200m, arrivé à un replat, monter vers la droite. Derrière la butte en haut de la montée, on débouche sur une clairière manifestement aménagée dans les fayards. C’est une ancienne charbonnière à ciel ouvert. L’exploitation a duré jusqu’après la fin de la dernière guerre, il y a encore des traces de charbon dans le sol.
En continuant à descendre au-delà de la charbonnière (c’est le chemin des charbonniers, moins pentu que celui qui descend directement au parking depuis les Tours), on arrive à une zone aplanie, qui était sans doute une zone d'entrepôt du charbon de bois avant son chargement sur des chariots, puis sur une piste forestière qu’on prend à gauche (à droite, la niche d’arrachement).
Au PD La Verrière, le sentier à droite descend directement en 10’ au parking. Prendre à gauche direction Allèves en 30’. Le chemin arrive sur une route goudronnée qui rejoint Allèves (chemin du Chenet). En sens contraire en venant d’Allèves, le sentier à droite est indiqué par un picto PDIPR.
En arrière-plan au loin dans l’axe d’Allèves, le Trélod.